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11 février 2018 7 11 /02 /février /2018 13:33
L'Ange Rose de Hortense Dufour

" Un jour d'hiver particulièrement morose, je quêtais sur le site internet une adresse douteuse. Le Néon Violet. Relaxation, la fin de la solitude.
Le Plaisir, les plaisirs. L'anonymat absolu. Une adresse, un téléphone, un lieu de plaisir
Je n'étais pas assez sotte pour ne pas deviner un lieu salace, un abysse où l'on se perd, où l'on se retrouve.
Je ne savais pas..."

La narration commence comme un journal intime, comme un murmure à soi- même. Une femme se raconte, monologue avec ses souvenirs, s'interroge :
" Que faisais- je, femme décente, petite bourgeoise, épouse d'un général au club douteux Le Néon Violet ?

J'y étais allée, comme on s'engage dans un chemin embourbé, barré d'un grand sens interdit, comme ça, sans rien comprendre à ce besoin de glisser au hasard d'une indicible ornière."

Une fille de 16 ans et un mari épousé, follement par amour, de 12 ans son aîné. 
A quarante sept ans, elle n'est ni la plus jeune, ni la plus mince, ni la plus laide, dans ce club de rencontre, enroulée dans son manteau.
Elle regarde, spectatrice des plaisirs qui se déroulent ...

Des femmes harnachées de jarretelles de bustiers en acrylique rouge, noir, mauve. De longues bottes en vernis ou des mules à talons. La jeunesse de ces femmes avaient avait fichu le camp, goutte à goutte sans pitié.
Aucune ici, les hommes non plus, n'avaient accepté le banal affront du temps.

Le Néon Violet, cette solitude de chairs frottées, de rires...La monotonie salace d'un plaisir payé.
Un présent s'inscrivait dans la lubricité bienheureuse de ce lieu.

Là- haut, la fille, moi si je le voulais, si je le payais, sur le dos, sur le ventre, à genoux, léchant, léchée, mordue, branlée, branlant, chevauchant, fouaillée au fond de tous les orifices.
Une gymnastique infâme que l'amour eut magnifié. 
La solitude de la jouissance.

Ma récompense approchait. Un albatros fonceur se posait face à moi. L'ange rose.

L'amour est irrésistible !
- Zangra ...soupiraient des voix. Il était l'aimant unique pendant ce moment unique ; ce moment rose.
Devenais- je folle ?... je voulais l'emmener avec moi, l'emporter je ne sais où. La détresse coinçait ma gorge.
J'étais tombée dans un coup de foudre. C'était la seconde fois de ma vie. C'était différent. Une brûlure intense.
Un danger suave et sans limite.

L'Ange Rose. Il s'appelle Zangra. L'arc adorable des lèvres .Au début le mépris. Il ne donnait rien. Il montrait sa carte sanitaire. Il parlait anglais, comprenait le français, disait quelques mots.
Etait- il bosniaque, serbe, croate, roumain ? Zangra.

- Affection .
Il m'appelait ainsi : Affection.
L'Ange rose était l'authentique danger d'amour.

- Mets - toi nue, c'est mieux.
Il attendit que je jetasse ces oripeaux de pute. Je grelottais légèrement étendue sur le drap violet qui faisait office de couvre- lit.
Il me serra contre lui très fort. J'étais nue, il était vêtu de noir. Nous fumions. La lumière devenait une léchure de lune. 
Je baisais la petite étoile bleue à son cou. Il eut une raideur imperceptible. 
- N'y touche pas.

Le spectacle d'un jeune homme très beau, si léger que ses bottes n'étaient même pas souillées de la boue du sol.
Zangra avait légèrement changé. Il me regardait vraiment. Nous n'avions pas besoin de la parole. Mon approche du désir aussi avait changé. Le désir est un sentiment complet. Je désirais l'ange rose à en mourir, et je ne voulais pas faire l'amour avec lui.

L'ange rose m'avait restitué le désir égaré. Je ne savais pas du tout où cette passion m'entraînait.
Une certitude flambait : j'étais bien. J'étais libre de quelque chose qui m'étiolait.

Zangra n'avait que sa personne à donner : il l'offrait, sans concession, sans exigence, il l'offrait, il prenait aussi.
Je baisais ce corps, des cheveux aux pieds, de la cheville aux yeux qu'il fermait à la manière d'une femme amoureuse.
- Combien faut- il pour te rendre ta liberté ?
- N'en parlons plus, je t'en prie. Il n'y a pas de liberté.

Quelque chose d'immense nous unissait, nous, que tout allait séparer...."

Presque chaque livre est une rencontre en lien avec une exploration intime, une expérience, une recherche...peut- être pas à chaque fois...
J'avais lu bon nombre des livres d'Hortense Dufour, puis je m'en étais détournée sans raison pour aller vers d'autres auteurs.
Il y a eut ce titre " L'Ange Rose". 
Et j'avais voulu écrire une chronique...je ne l'avais pas faite...j'ai retrouvé des esquisses, et il n'est peut- être pas trop tard de parler d'un roman qui bouleverse...

( L'Ange Rose. Hortense Dufour. Editions Du Rocher .2004 )

 

                                                                                                      Hécate.

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commentaires

A
Il n'est jamais trop tard pour parler d'un beau livre. Amitiés.
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M
Les lectures sont autant d'invites aux voyages...<br /> Voyages imaginaires...nourris à d'obscurs ou éclatantes réalités...<br /> <br /> Chère Hécate, douces pensées, pour une agréable journée, <br /> Michèle
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H
Merci chere Ariga
E
Voilà que je passe par hasard. Tu es revenue avec un livre qui se rapproche de celui que je suis en train de terminer (LA DEROBADE de Jeanne Cordelier). Merci pour cet extrait. Je te souhaite une bonne soirée en espérant que tu vas bien ?
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A
Enfin, je retrouve cette merveilleuse plume qui donne envie de courir à la librairie et de lire. Amitiés.
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H
Merci de ce passage ici

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