LE VAMPIRE
Il s’éveille quand tout du jour s’évapore
Comme un silence né des vapeurs de l’horizon
A contre-temps, à contre-jour, à contre aurore,
Aux mortels, il va livrer la litanie de ses oraisons.
Telle une lance dressée dans le pourpre du soleil
Sa devise est de mourir à chacun des jours
De cette mort assumée dont il s’éveille
Délirant de beauté, paré de tous ses atours.
Son manteau de sang est une œuvre d’art
Jusqu'à la note perçante de ses dents pointues,
Voluptueux amoureux de la gorge élue,
De ses pâleurs de nacre, de sa saveur rare.
Le cimetière est sa frontière
L’immortalité son espace
La croix de Dieu sur son cœur d’ébène s’est glacée,
Le capiteux pavot coule pourpre dans ses veines,
Une vie sous son étreinte vient de s’effacer
Le destin s’appelle hasard, lui l’appelle aubaine !
Ses yeux d’eau sombre
Ont vu des paysages
Sans limite d’amertume
Vieux loup maraudeur des hameaux du désespoir
Errant sous la lune, fanal de sa non-vie,
Sa faim est un labyrinthe où il suit son envie,
Il joue à ensorceler le vent, à souffler sur les mémoires
Les oiseaux compatissants sont en pleurs
Eblouis par cette beauté qui froisse l’ombre
Ses mains ont désappris depuis longtemps la chaleur,
De ses ongles il griffe le ruissellement sombre
De ces invisibles torrents d’énergie, feu de cette vie
Qui n’est plus que vitrine où choisir ses proies
Envers du désir, désert de l’endroit
Ô merveille de la phosphorescente jeunesse impie !
L’équateur est franchi
Brume et cinéraire pour parure
Remugle de pourriture et de terre
Pour parfum...
Il va s’emprisonner toutes les aubes
Derrière les grilles du cimetière
Et s’en va reposer sous la robe de pierre
Entre poussière et cendre sous le vent qui rôde.
Le vampire maquille son visage
Pour tromper la vermine...
Hécate.