La flamme d’une écriture, force d’infinitude et de déchirure, celle de Daniel Arsand qui nous narre en ce court roman d’une densité poétique rare, la magnifique passion de deux êtres que tout devrait séparer et que l’intolérance arrachera l’un à l’autre…
Nous sommes au 18ème siècle, mais qu’importe l’époque puisque tout amour pareil à celui-ci est intemporel, et c’est en cela qu’il touche et bouleverse !
Violence, tendresse, douleur tout au long de cette pathétique histoire. Tout commence par l’irruption d’un cheval au galop monté par un cavalier intrépide. Parmi les genêts Sébastien quinze ans, pareil à un berger de l’antiquité garde son troupeau. « Une étendue fangeuse » entre Sébastien et le cavalier désarçonné qui s’écroule au pied du berger.
La symbolique est claire : l’étendue fangeuse n’est autre que celle d’une société intolérante et dangereuse, non l’amour qui va naître entre ces deux êtres de condition différente. Balthazar de Créon est un seigneur, Sébastien Faure un paysan qui connaît les simples. L’amour sorcier, les plantes qui guérissent… la nature toute puissante. Ils sont deux à être foudroyés et ne le savent pas encore. Sébastien murmure : « - Je suis à vous » à l’homme tombé qu’il relève. Tout est commencé.
Rien ne finit jamais… du feu qui embrase corps et âmes. Ne rien dire d’autre… lire ces pages magnifiques. Frémissements d’herbes, de feuillages, frémissement de la chair.
Transcendance d’ombre et de lumière, comme dans le clair – obscur d’un tableau. Daniel Arsand est poète, peintre, troubadour. Il joue de l’ombre, de la lumière, du verbe. Il met le feu. Dix huitième siècle des bûchers, des ogres qu’on accuse d’atrocités… La cour du Roi… Versailles… Une fête qui sombre dans l’ombre blafarde qui condamne… l’abjection de la folie… une mère vaincue… « L’un n’est pas l’ombre de l’autre » écrit-il. Et tout est dit ou presque… « Ne nous quittons jamais ».
Liturgie profane et profonde. Simplicité, beauté, ferveur. Comme dans une tragédie antique.
C’est à Théocrite (III siècle avant J.C.) de conclure : « Ils furent l’un à l’autre sous le même et unique joug d’amour. En vérité, ces hommes étaient l’or de l’âge d’or : comme vous aimiez, vous étiez aimés ! »